L’énergie solaire pourrait-elle devenir la pierre angulaire du système énergétique français et un outil de relance pour notre économie ? C’est en tout cas ce vers quoi tend le scénario de l’étude prospective publiée par Enerplan. Dans son rapport “Compétitivité et emploi de la filière solaire française d’ici 2023”, réalisé en partenariat avec l’Ademe, le Groupement des Métiers du Photovoltaïque et le think tank France Territoire Solaire, les membres du Syndicat des Professionnels de l’Énergie Solaire estiment que la filière pourrait permettre la création de plus de 25.000 emplois et générer près de 180 millions d’euros par an de retombées fiscales pour les collectivités.
La reprise du secteur photovoltaïque français
Le soleil brille à nouveau sur la filière photovoltaïque française. Après une impressionnante baisse de régime à la suite du moratoire des débuts des années 2010, qui aura fait perdre à l’industrie solaire 60% de ses effectifs, le secteur semble en effet peu à peu retrouver le chemin de la croissance. Grâce à une compétitivité retrouvée et une Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) ambitieuse, la filière solaire française devrait être à l’origine de la création de plusieurs milliers d’emplois à l’horizon 2023.
Pour rappel, le ministère de l’Environnement a publié en octobre dernier les grandes lignes d’une PPE qui fait la part belle à l’énergie solaire photovoltaïque : le gouvernement souhaite s’appuyer sur des appels d’offres réguliers pour atteindre d’ici l’horizon 2023, une puissance solaire totale comprise entre 18,2 et 20,2 GW. Soit 13 GW de plus qu’aujourd’hui.
Actuellement, la filière compterait quelques 10.000 emplois directs. L’atteinte des objectifs de cette PPE permettrait de créer plus de 10.000 emplois (6.200 emplois directs et 3.600 indirects) soit quasiment un doublement des effectifs actuels. Selon un scénario encore plus ambitieux, si la France dépasse de 10% ses objectifs photovoltaïques PPE, ce ne seraient pas moins 16.000 postes qui seraient créés.
“L’ensemble des scénarios envisagés démontre que l’objectif de la PPE pour l’électricité solaire devrait être atteignable, avec à la clé au moins 10.000 emplois supplémentaires d’ici 2023 par rapport à 2016. Une part (…) importante des emplois est liée à la maintenance et constitue donc une source d’emplois pérennes et non délocalisables”, précisent d’ailleurs les auteurs de l’étude d’Enerplan.
Le grand photovoltaïque et l’autoconsommation vise la rentabilité
Les différents scénarios prospectifs de l’étude tendent à démontrer que l’objectif initial de la PPE sera atteignable avec un recours limité au soutien public. Les chiffres de l’étude démontrent que les technologies solaires devraient atteindre au cours des 5 prochaines années un seuil de compétitivité ouvrant la voie à de nouveaux modèles. L’étude pointe ainsi la forte baisse du coût d’installation des centrales solaires : les subventionnements nécessaires à la filière sur la période 2016-2023 seront donc bien plus faibles que ceux de la période 2007-2016.
Les centrales au sol et sur grandes toitures devraient voir leurs coûts de production baisser de 20% d’ici 2025. Les centrales photovoltaïques au sol de la moitié Sud de l’Hexagone produiront par exemple une électricité dont le coût devrait passer de 66€ le MWh actuellement à 50€ le MWh.
“Compte tenu de la forte baisse des coûts du photovoltaïque, on pourra toutefois s’affranchir de tout soutien public dans certains endroits ensoleillés à horizon 2023-2025” – Antoine Huard, président de France Territoire Solaire.
Les systèmes solaires sur toiture devraient également voir leur prix baisser, jusqu’à 25% d’ici l’horizon 2025. Cette tendance devrait permettre de favoriser le “décollage progressif du marché de l’autoconsommation”. Dans la Région PACA, les installations de plus de 250 kWc sont déjà rentables sans soutien.
“Dans le résidentiel, la mise en place d’un tarif d’achat pour les solutions surimposées (arrêté en cours de rédaction) devrait entraîner de façon rapide une baisse du coût de production. L’intégré au bâti se positionnera préférentiellement sur le neuf, où il a un avantage compétitif (substitution d’éléments de couverture)”– estiment les auteurs de l’étude.
Le solaire thermique n’affiche en revanche pas d’aussi bonnes perspectives. Les professionnels espèrent notamment que l’application de la Stratégie nationale bas carbone, qui vise à réduire les émissions de CO2 dans le parc bâti, permettra de rendre le solaire thermique plus compétitif. Pourtant, si l’objectif médian de la PPE (entre 270 à 400 ktep de solaire thermique déployés en France) était atteint, cela entraînerait la création de 10.000 emplois supplémentaires d’ici 2023. Portant ainsi à 25.000 le nombre d’emplois créés par l’ensemble des filières (électricité solaire et solaire thermique).
Une filière qui a besoin de stabilité pour être bénéfique à l’économie française
L’ensemble de l’étude d’Enerplan s’appuie sur les projections 2023 de la PPE instaurée à la suite de la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte votée en juillet 2015. “Cette PPE apporte à nouveau aux entreprises du secteur la visibilité dont elles ont besoin concernant le cadre réglementaire “, explique Daniel Bour, président d’Enerplan, en insistant sur la nécessité de maintenir ce cadre pour redonner confiance aux investisseurs.
“À cette stabilisation réglementaire, s’ajoute le fait désormais établi que l’énergie solaire, grâce à des gains de productivité exceptionnels au cours des 10 dernières années, est aujourd’hui devenue la source d’électricité la plus compétitive dans de nombreuses régions”.
Enerplan lutte également contre “cette idée préconçue selon laquelle l’emploi dans le solaire serait exclusivement concentré dans des usines de fabrication de panneaux, situées en Chine”. Les panneaux solaires représentent en effet entre 20 et 40% (en fonction de la présence d’un système de stockage dans la centrale) de la valeur ajoutée totale d’une centrale.
“Les emplois de demain sont à créer dans ce qui constitue la véritable bataille des années à venir : la gestion de l’intermittence (…). Si l’énergie solaire peut créer 25.000 emplois, ce potentiel pourrait être décuplé, en misant sur le stockage et la flexibilité. L’électricité solaire est au cœur d’un écosystème technologique et industriel innovant à l’échelle mondiale, dont la France doit pleinement tirer parti”.
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